vendredi 26 février 2016

Introduction


Claude Lévi-Strauss, illustre anthropologue et ethnologue français, écrivait : « Tout progrès culturel est fonction d’une coalition entre les cultures. Cette coalition consiste dans la mise en commun […] des chances que chaque culture rencontre dans son développement historique. […] Cette coalition est d’autant plus féconde qu’elle s’établit entre des cultures plus diversifiées. […] Ce jeu en commun, dont résulte tout progrès, doit entraîner comme conséquence […] une homogénéisation des ressources de chaque joueur. […] L’humanité est constamment aux prises avec deux processus contradictoires dont l’un tend à instaurer l’unification, tandis que l’autre vise à maintenir ou à rétablir la diversification. »[1]
            Cette contradiction évoquée par Claude Lévi-Strauss est le point de départ de toute tentative de compréhension du phénomène sectaire. À la fois dépendante de l’apport des cultures étrangères et menacées par elles, l’évolution sociétale est tiraillée par ce paradoxe.
            Un point d’équilibre se dégage cependant de cette dissonance : le respect (ou le non-respect) de l’ordre social établi. Comme le souligne Nathalie Luca, directrice de recherche au CNRS[2] et au Centre d’étude interdisciplinaire des faits religieux à l’EHESS[3], et ancien membre de la Miviludes, toucher à ce dernier provoque une réaction tant de la société que des gouvernements, et ce, dans toutes les civilisations et depuis toujours[4].
            L’objectif de notre présent propos n’est pas d’analyser le phénomène sectaire, mais d’en dresser un état des lieux, de lister ses techniques de recrutement et ses multiples dangers, d’observer l’attitude de nos pouvoirs publics à son égard et d’apprécier le rôle que pourrait jouer l’enquêteur de droit privé en la matière.
L’usage du conditionnel n’est pas anodin. Intervenant dans de nombreux domaines, le détective privé ne touche aux dérives thérapeutiques et sectaires que d’un simple doigt. Alors que nos recherches nous ont poussés à explorer les sites Internet d’un grand nombre de professionnels de l’enquête privée, et quand bien même certains proposent leur service dans ce domaine spécifique, un constat s’impose : nos confrères ne connaissent pas — ou très peu — le monde des dérives thérapeutiques, et encore moins celui des dérives sectaires.
Nous verrons dans une première partie ce qu’elles représentent respectivement, et ce qui les différencient, tant au niveau de leur typologie (A) que de leur organisation, de leurs techniques de recrutement et des dangers qu’elles représentent pour l’individu et la société dans son ensemble (B).
Dans une seconde partie, notre présente étude consistera à rapprocher le monde des dérives thérapeutiques et sectaires de celui des détectives privés. Nous observerons que face à un phénomène croissant — tant dans ses dimensions que dans ses dangers —, la réponse des pouvoirs publics est souvent loin d’être efficace (A), et que notre rôle en tant qu’enquêteur privé pourrait à terme s’avérer indispensable (B).


[1] Claude Lévi-Strauss (1973), Anthropologie structurale deux, Paris : Plon, p. 418.
[2] Centre national de la recherche scientifique, Paris 16ème.
[3] École des hautes études en sciences sociales, Paris 13ème.
[4] Nathalie Luca (2011), Les sectes, Paris : PUF, p. 4-5 (Que sais-je ?).

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